Modèles de revenus pour les jeux vidéo

16 décembre 2007 - 16:14 | Dans Business & startups, Création de jeux vidéo | 4 commentaires

Avec un peu (bon ok, beaucoup…) de retard, je vous donne un petit compte rendu du Salon Net Lille 2007 Metropole.

Une grande partie de ce que j’ai vu (car on ne peut pas aller à toutes les conférences) était consacrée aux mondes virtuels (lire: Second Life) et aux applications gravitant autour (e-commerce dans les mondes virtuels, avatars virtuels, etc…).

Bien que ces conférences sur Second Life (SL) étaient intéressantes, perso je ne crois pas que cela représente « le futur ». Pour moi, SL c’est juste une mode qui est en train de s’essouffler et passé l’amusement au bout de 10 minutes, y’a plus trop grand chose à faire. Concernant l’e-commerce, je ne quitterais pas Amazon pour me prendre la tête dans des magasins virtuels en 3D.
Voilà c’était l’instant grognon du post, c’est contractuel, je suis obligé de ne pas faire des posts entièrement positifs :).

Par contre, une conférence m’intéressait particulièrement, celle sur les modèles de revenus pour les jeux vidéo. Je ne vais donc détailler que celle là. Pour le reste, allez sur le blog de l’événement.

Globz et Globulos
Cette conférence a commencé par le récit de la société Globz et de son jeu Globulos.

La boîte a commencé en 2000 en faisant de la syndication de contenu (c’est à dire en gros, faire des jeux flash dont elle vend ou loue les droits de diffusion à des gros portails comme Yahoo ou Wanadoo/Orange). Ceci a été fait de 2000 à 2003 (c’était la grande mode à l’époque) et n’a jamais réellement marché, mais cela a permis au studio de se créer une vitrine.

Le studio devait survivre avec de la prestation de service de jeux pour d’autres boîtes, ce qui prenait du temps et n’en laissait donc plus beaucoup pour les projets propres au studio.

A partir de 2003, le jeu Globulos a été mis à disposition gratuitement et a connu un grand succès: 400 000 inscrits, 10 000 visiteurs par jour dont 50% provenant de France.

En 2004, le jeu passe en payant: 3 euros par mois pour avoir l’accès à tout, sachant que 10% du contenu du jeu reste accessibles en accès gratuit.
Ce passage se fait en catastrophe car il est inattendu des joueurs et ceux ci quittent le jeu en masse, passant de 400 000 inscrits à … 400 !

Depuis, le jeu est passé en Free2Play, c’est à dire que la base du jeu est entièrement gratuite mais que l’on peut acheter des items avec des micropaiements (sms, allopass…) qui permettent de changer le look des personnages ou d’avoir des bonus supplémentaires.

Ankama
Le deuxième témoignage concerne Ankama (l’équipe derrière Dofus, pour ceux du fond qui ne suivent pas…).

Ankama a démarré en 2001 en temps que Web Agency orienté Flash (revenus assurés pour la boîte le temps de faire les jeux: checked).

Dofus a ensuite été créé. Il était prévu dès le départ qu’il soit payant avec un abonnement mais gratuit pendant la beta. Ceci a permis d’éviter le problème de frustration lors du passage au mode payant.
La beta a réuni 10 000 joueurs et a débouché sur 4 000 joueurs payants au 1e mois (c’est un taux de conversion de 40%, c’est absolument énorme !)

Le coup de Poker qu’a réalisé Ankama (et je ne sais même pas s’il s’en était rendus compte à l’époque), c’est d’avoir fait de leur faiblesse (pas beaucoup de moyens, petite équipe) un facteur de différenciation pour créer leur océan bleu (oui, on y revient toujours).
Au lieu de faire un MMO 3D comme toutes les boîtes de l’époque (Everquest, Asheron’s Call, Star Wars Galaxies…) et comme tous les projets fpda sur les forums de gamedev amateurs aujourd’hui, ils ont pris le pari d’utiliser leur (unique ?) force (la connaissance de Flash) pour créer un jeu sans concurrence directe, là où Nevrax (Saga of Ryzom) a du affronter World of Warcraft, avec les conséquences que l’on connaît.

Le succès de Dofus s’est également étendu avec les artbooks et les mangas. Il faut savoir que les mangas Dofus sont les meilleurs ventes de manga en France ! Là aussi c’est très ingénieux, il s’agit de s’appuyer sur un succès pour s’en créer un autre dans un autre domaine grâce à sa notoriété (ce qui ne marche pas toujours, cf Ngage).

Aujourd’hui, Dofus c’est 300 000 abonnés à 5€ par mois (oui, 1,5 millions d’euros par mois, vous avez bien lu) dans 150 pays, la France étant toujours largement en tête.

Pour leur prochain jeu, Waqfu, la sortie sera mondiale et l’univers sera cross-media, c’est à dire qu’il y aura des mangas ainsi que des dessins animés en même temps que la sortie du jeu.

Le free2play avec des bonus vendables par micropaiement a été envisagé à un moment, mais cela posait plus de problèmes qu’autre chose: si cette pratique est bien vue en Corée, c’est plutôt vu comme de la triche en France. L’autre problème concerne les habitudes d’utilisation, car si le SMS est très répandu en France, ce n’est pas le cas en Italie par exemple.

Le coup de développement total de Dofus a été estimé à 1 200 000 dollars, mais il est difficile de le chiffrer réellement car il évolue tout le temps (du contenu est rajouté régulièrement) et une partie de son développement a servi pour d’autres produits (mangas et artbooks).

Par contre, rien n’a été dépensé en communication, tout l’aspect com & marketing est basé sur le viral.

Enfin, l’équipe a eu des problèmes au début pour traduire le jeu en anglais, car Dofus contient beaucoup de blagues sur les noms ou sur des références dans la culture française. Une simple traduction ne suffit pas, il faut vraiment localiser le jeu en fonction de la culture visée.
Il faut voir aussi que certaines cultures sont plus sensibles sur des points que d’autres (par exemple les graphismes de Dofus ont beaucoup de succès dans les pays hispaniques).

Musée de Tokyo
Le troisième témoignage concerne une personne du musée de Tokyo qui racontait comment ils mettent en place un système pour vendre sur Second Life des oeuvres virtuelles uniques et limitées dans le temps d’artistes plus ou moins connus. Par exemple, vous pouvez pour quelques centaines de dollars (réels) avoir une oeuvre unique que vous pourrez mettre sur votre île de SL.

Vous aussi vous avez un froncement de sourcils là ? 🙂

Aspect Finance
Le dernier intervenant a abordé l’aspect financier des jeux vidéo, en soulignant que les types de Business Models évoluent et ne marche pas tous (en citant les problèmes de Kalisto) et qu’il y a une tendance de passer du B2B (Business To Business, par exemple un studio qui vend son jeu à un éditeur, ce dernier le vendant aux magasins qui le vendent aux clients) au B2C (Business To Consumer, par exemple Dofus qui est vendu directement par le studio aux abonnés, sans intermédiaire).

Ensuite, un gros problème concerne les besoin de capitaux pour les studios. Les choix les plus courants étant de « vendre son âme à un éditeur » (= céder les droits de propriété intellectuelle avant même que le jeu ne soit fait) ou alors en ayant une activité annexe permettant la survie du studio (ex: l’aspect Web Agency d’Ankama évoqué tout à l’heure).

Pour lui, le business model idéal serait le suivant: 50 jeux (bon pas des AAA non plus…) sont développés en parallèle. Au fur et à mesure du développement, on stoppe les moins prometteurs et on les « recycle » en vendant leur droit d’usage (pour une version sur téléphone portable par exemple) ou même en les revendant aux opérateurs de pays en voie de développement (ça va pas aider à faire fortune mais c’est toujours ça de pris).

Ensuite, il faudrait que les créateurs se forment dans les domaines de la gestion et de la recherche de fonds, ce qui est généralement leur gros point faible. D’autant qu’il est plus « facile » de trouver 5 millions d’euros que 300 000 (le projet parait plus crédible avec une demande plus grosse), les gros investisseurs préférant mettre beaucoup pour assurer un succès mondial.

Divers
Dans les questions ont été abordés deux autres modèles:
– l’argent issu de jeux d’argent virtuels (style poker), sachant que c’est interdit en France dès qu’il y a une partie de hasard dans le jeu (comme c’est le cas pour le poker)
– les jeux de grattage virtuels style Prizee

Pour finir: un grand jeu concours. Le premier qui me retrouve sur la photo gagne une Bugatti Veyron (mais faut venir la chercher, je livre pas à domicile) 🙂

Où est Dam's ?

4 Comments »

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  1. Merci pour le compte rendu, ç’est très intéressant ^_^

    Commentaire by Daz — 17 décembre 2007 - 11:24 - #

  2. Et merci pour les infos sur Ankama, je n’avais qu’une vague idee de leur parcours, c’est plutot instructif.

    1.2 millions pour un jeu en service depuis 3 ans (et donc dev depuis bien 4 ans ?) c’est clair que c’est pas enorme… rien que le cout d’un programmeur sur cette periode doit tourner autour de 200k. Chapeau !

    Commentaire by MMoi — 5 janvier 2008 - 13:26 - #

  3. Etrange. Pas plus tard que vendredi, je cherchais le budget de développement de Dofus… Et je ne l’avais pas trouvé (pour autant, il me semble qu’il était public au moment de leur consécration à l’IGF. Mais bon).

    En tout cas, merci pour ces différents posts. J’aime bien le ton et les sujets.

    Commentaire by Emmanuel Deloget — 21 janvier 2008 - 17:51 - #

  4. Merci.

    Pour le budget de Dofus, il date justement de l’IGF (ou autre acronyme du genre) aux USA où ils ont du donner un chiffre. Ca a du bien augmenter depuis le temps au vu de l’augmentation de leur staff.

    Commentaire by Dam's — 21 janvier 2008 - 18:52 - #

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