Erreur classique n°12: « Je dis rien parce qu’on va me piquer mes idées ! »

18 septembre 2010 - 18:22 | Dans Création de jeux vidéo, Erreurs classiques | 29 commentaires


Ils sont là ! Prêts à vous dépouiller de vos idées géniales ! Ayez peur !

Vous avez déjà dû voir sur un forum la chose suivante:
– un gars vient proposer un projet de jeu et recrute du monde, mais « ne peut rien dire de plus sur son projet parce que sinon on va lui piquer ses idées ».

Et bien vous savez quoi ? Ces gars ont bien raison !
Il existe un grand trafic d’idées sur internet.

L’horrible vérité :

La faute à qui ?

La faute aux chinois bien sûr ! Ils sont organisés dans le but de voler vos idées !!
C’est affreux !

Et, pour toi lecteur, j’ai pris des risques insensés et j’ai infiltré un tel groupe chinois underground de voleurs d’idées grâce à mon talent d’imitateur de chinois (merci Michel Leeb pour ces leçons de vie !).

Voici donc leur façon de procéder:

  • Ils vont sur des forums de créateurs de jeux vidéo amateurs
  • Ils regardent les présentations de projets, celles où les posteurs dévoilent bêtement leurs idées de jeux (vous savez, le super scénario original à peine pompé du Seigneur des Anneaux avec un monde anciennement en guerre mais maintenant en paix mais qui va redevenir en guerre car le grand méchant d’avant va revenir encore plus méchamment qu’avant)
  • Ils les transmettent en Chine où des milliers de programmeurs développent ces idées et les transforment en hits planétaires
  • L’opération leur rapporte des millions de dollars
  • L’inventeur de l’idée d’origine comprend son erreur, est dégoûté et reste prostré dans sa douche pendant des jours en pleurant

Voilà, vous savez tout !

Hum…

Bon plus sérieusement, c’est pas exactement comme ça que ça se passe.

Avant donc d’écrire que vous ne pouvez rien écrire, lisez ceci:

Sachez que:

  • C’est normal d’être parano lors de ses premiers vrais projets. On passe tous par là, ce n’est pas sale
  • On a toujours l’impression que son idée est géniale. Généralement elle ne l’est pas, souvent par manque de connaissances sur le milieu ou par manque de recul
  • Personne ne va être intéressé par votre projet si vous ne dévoilez rien d’utile
  • On ne demande pas le cahier des charges intégral, mais juste assez pour comprendre l’intérêt du projet
  • Ce n’est pas l’idée qui compte, c’est sa réalisation ! Avoir des idées géniales c’est facile. Un téléphone qui fait console de jeu, c’est génial… Nokia a eu cette idée avant Apple en proposant le Ngage. On connait la fin de l’histoire

Bien sûr il ne faut pas tout dévoiler non plus (de toute façon sur un forum on ne fait que présenter un projet)

Prenons le problème dans l’autre sens:

Admettons qu’effectivement on va vous piquer votre idée si vous la dévoilez.
Reprenons le contexte: vous êtes sur un forum de gamedev amateur.
Qui est le public des forums de ce type ? d’autres dev amateurs !

Quel est le taux de jeux créés et terminés par des dev amateurs ?
> quasi nul

Quel est le taux de dev amateurs prêts à lâcher leurs projets pour juste reprendre votre idée ?
> quasi nul

Par conséquent, quel est le taux de succès qu’un gamedev amateur pique votre idée ET arrive à finir de créer le jeu ?
> quasi nul X quasi nul = mega presque rien

Donc voilà, les personnes à qui vous allez dévoiler votre idée ont généralement autant de chances que vous de ne pas le finir si jamais elles auraient envie de vous piquer l’idée.

Ceux qui en auraient les capacités ont souvent déjà un projet, les débutants ne seront pas capables de finir le projet et les pros ne s’embêteront pas à fouiller des forums amateurs.

De plus, ceux qui copient les idées copient celles qui marchent ! Tant que votre projet n’a pas de succès, personne ne va s’embêter à le cloner.

D’expérience perso:

  • J’ai déjà donné des idées sur Internet que personne n’a repris
  • J’ai déjà trouvé des projets qui reprenaient mes idées alors que je n’en avais parlé à personne
  • Moralité: tout le monde a des idées dans tous les sens, et si vous trouvez une bonne idée, sachez qu’il y a sûrement 10 autres personnes dans le monde qui ont eu la même…

Est-ce vraiment grave si ça arrive ?

Maintenant, imaginons que quelqu’un vous pique réellement votre idée, un autre gars du net qui s’est inspiré de votre projet pour faire le sien. Est-ce vraiment si grave ?

Voici un exemple me concernant, j’ai découvert il y a peu ce magnifique tuto sur la façon de présenter un projet sur un forum.

Ça ne vous rappelle rien ?

Voilà, les points communs sont beaucoup trop nombreux pour que cela ne soit que le hasard, ce qui signifie une chose: un gars s’est donné du mal à maquiller et paraphraser mon article pour faire croire que c’est lui qui l’avait fait.
Alors oui, je pourrais le prendre mal et demander que ça soit retiré, et tout ça…

Mais prenons une autre approche: quelqu’un s’est cassé le cul à pomper ce que j’ai fait pour être fier de faire croire qu’il était fort dans ce domaine.
Vaut-il mieux ça ou qu’au contraire tout le monde n’en ait rien à faire de ce que j’écris ?

Comme on dit, « l’imitation est la forme ultime de la flatterie »

Revenons à votre idée de jeu: vaut il mieux que le concept intéresse d’autres personnes qui en viennent à s’en inspirer ou que personne n’en ai rien à faire ?

Ce n’est qu’un jeu amateur fait pour le fun, est-ce si grave ?
(je ne parle pas de projets pros)

Conseils divers:

  • Demandez vous pour chaque élément s’il y a vraiment un risque à donner l’info ou pas. Généralement il n’y en a pas
  • Prenez un nom de code pour votre projet
  • Dîtes les choses ou ne les dîtes pas, mais évitez les « je sais des trucs mais je peux pas les dire », ça fait gamine de 7 ans qui dit « ouais j’ai un secret mais je peux pas te le dire, nananèreuuuh »
  • Votre jeu est-il si révolutionnaire que ça ? votre scénario est-il si important ? ça ne tient que sur le concept ?
  • Personne ne sera intéressé par un projet fantôme
  • En règle générale: donnez l’idée de base et gardez les détails pour vous
  • Mot de la fin: les idées ne valent rien, seule leur réalisation compte

Erreur classique n°11: Faire un mmo 3D amateur

25 avril 2010 - 22:25 | Dans Création de jeux vidéo, Erreurs classiques | 55 commentaires


Tabula Rasa: mmo pro, 6 ans de dev, fermé au bout de 16 mois d’activité.
Vous pensez faire mieux avec moins ?

Ça y est, vous vous dîtes… Dam’s devient vieux, il radote et va nous ré-expliquer des trucs qu’il nous a déjà dit.

Oui mais non.

J’avais déjà donné mon avis sur la mauvaise idée de se lancer dans des projets trop complexes ou avec trop de contenu à produire.
Il n’empêche que certaines équipes amateurs, même en sachant ça, basent tout sur leur motivation pour passer outre ces « petits problèmes ».

En réfléchissant, je pense qu’il y a une réponse supplémentaire à leur apporter : même si vous réussissez à ne pas vous démotiver et à avoir un MMO jouable, ce sera un échec.
La raison: parce que personne n’y jouera.

Explications:

Problème numéro 1: la technique

Un MMO 3D est l’un des types de logiciels les plus difficiles à concevoir.
Il doit en effet être (entre autres…):

  • réactif: performances, lag, etc.
  • « scalable »: architecture réseau pour supporter des milliers de joueurs
  • synchronisé: bases de données, architecture, game design, etc.
  • protégé: piratage, triche, etc.
  • opérationnel: fonctionne quelques soient les cartes graphiques, systèmes d’exploitation, etc.

Cela implique de nombreuses expertises: sécurité, bases de données, administration, programmation, réseaux, moteur 3d, etc.
Un programmeur, même très bon, ne peut pas être expert dans tous ces domaines et d’un autre côté mettre des programmeurs débutants ensembles sur autant de domaines différents à la fois ne donnera généralement rien de bien.
Si vous réussissez à avoir plusieurs programmeurs expérimentés, ils ne resteront pas longtemps sur un projet « bénévole amateur » quand leurs compétences peuvent être utilisées dans un projet professionnel.

La plupart des projets capotent à ce niveau là.

Mais on va faire comme pour la chauve-souris de Bigard: « Admettons ! »
Admettons donc que vous y arrivez… Que vous avez techniquement un truc qui tienne la route, pas forcément scalable ni super sécurisé tout ça, mais qui marche avec quelques joueurs.

Nous avons alors le :

Problème numéro 2: le contenu

Faire du contenu intéressant pour un MMO 3D est compliqué et demande beaucoup d’autres talents différents:
– un scénariste expérimenté (car oui, tout le monde peut s’improviser scénariste pour avoir une idée de jeu, mais sincèrement la plupart des scénars que l’on voit dans les projets de jeux amateurs sont très mauvais autant sur le fond (patchworks de scénars de jeux/films existants) que la forme (fautes, récits déstructurés et narration foireuse))
– des graphistes / modeleurs / animateurs, etc.
– des game designers
– des sound designers / musiciens

Non seulement il faut que ces artistes arrivent à s’entendre avec les programmeurs (ce qui n’est pas toujours facile…), mais il faut aussi une cohérence entre les différentes compétences et différents styles des intervenants.

Mais « admettons » que vous arrivez à avoir un début d’univers cohérent, quelques persos et décors et 2-3 missions. C’est pas du grand art, vos arbres sont moches et le perso court bizarrement mais soit… vous améliorerez ça au fur et à mesure n’est-ce pas ?

Problème numéro 3: faire venir les joueurs

Quel intérêt de faire un MMO sans joueurs ?
C’est là que va être le plus gros problème. Et c’est un problème récent.
Il y a 10 ans, ça n’aurait pas du tout été un problème mais aujourd’hui c’est le plus important.

Vous avez donc votre début de MMO 3D, vous faîtes un peu de pub pour avoir des testeurs qui viennent et puis s’en vont.
Les joueurs vont arriver et repartir, et ça va être très dur de les faire rester.

La raison ? Un mmo 3D n’a plus rien d’innovant en lui même et il en existe des tonnes.
En 2002, même un truc pourri mais gratuit aurait gardé du monde parce que les seuls mmo 3D qui existaient étaient payants.

Aujourd’hui, non seulement les MMO payants sont beaucoup plus avancés, mais avec le Free To Play les joueurs ont accès gratuitement à des MMO 3D de qualité professionnelle réalisés par des studios ne faisant que ça et ayant parfois levé des millions de dollars pour les faire.

N’importe quel joueur a donc accès à tout ça, mais aussi à tous les social games sur Facebook, les jeux sur iPhone, sa R4 blindée pour NDS, des tas de jeux sur portails Flash, etc.
Tout ça GRATUITEMENT.

Qui va donc s’embêter à rester sur un MMO amateur vide, buggué, moche et sans originalité en attendant qu’il s’améliore pour devenir convenable ?
Et comment allez vous améliorer un MMO si les joueurs ne viennent pas ?

Le voilà le problème. Un MMO 3D « seul » ne suffit plus. Il faut qu’il soit très bien réalisé et qu’il soit innovant/atypique pour que les joueurs daignent s’y intéresser. Il faut y intégrer une vision stratégique, commerciale, marketing et communication pour avoir une chance d’exister.

Hors ceci est déjà très difficile pour des pros, alors des amateurs bénévoles faisant ça pendant leur temps libre… mission impossible ?

Un MMO 3D amateur, ça n’existe pas !

…ou du moins, je n’en connais pas (merci de me les signaler sinon).

Je pense qu’un projet de ce genre ne doit être envisagé qu’avec un point de vue « business ». Il faut qu’il y ait un projet d’entreprise derrière.

La stratégie du « on fait un MMO 3D entre potes bénévoles et on partage à la fin » est un mythe. Il faut un business model derrière, il faut des fonds, il faut constituer une équipe à plein temps, etc.

D’autres informations avant de fermer la parenthèse du MMO 3D amateur (parce qu’on aura fait le tour je pense):

  • On peut appliquer quasiment l’article entier aux RPG 3D
  • Même les studios pros avec des financements en millions de dollars se plantent (Ex: Auto Assault, Tabula rasa…) ou basculent en Free to Play en catastrophe pour sauver les meubles
  • N’espérez pas réitérer l’exploit de Runescape ou Dofus de la même façon. Ces jeux sont sortis à une époque où il y avait beaucoup moins de concurrence. Cela ne veut pas dire que c’est impossible de réussir aujourd’hui, juste que l’approche qu’ils ont pris ne suffit plus de nos jours. Si Dofus sortait aujourd’hui, il serait noyé dans la masse.
  • Exception à la règle: Je connais en fait un MMO amateur (amateur dans le sens « Il n’y a pas d’équipe à plein temps dessus ») qui pourrait marcher, c’est Infinity. Mais le programmeur unique derrière le projet est un dieu de la prog et le problème du contenu a été en parti réglé par de la génération procédurale. Maintenant le projet est toujours en dev depuis plus de 5 ans et je ne sais pas s’il sortira un jour.

Cela veut il dire que faire un mmo 3d est impossible ?

Pour moi, en temps qu’amateurs oui.

Sur les 3 dernières années, pouvez vous me donner le nom d’un :

  • MMO 3D amateur qui aurait marché ? (sans entreprise derrière)
  • MMO 3D indépendant qui aurait marché ? (avec une entreprise de moins de 10 personnes à temps plein) (NB: 3DDuo ça compte pas donc 🙂 )

Conclusion:

Si vous tenez *VRAIMENT* à faire un MMO 3D qui marche parce que c’est le but ultime de votre existence, je pense qu’il n’existe que deux solutions:
– spécialisez vous dans un domaine, devenez le meilleur là dedans et faîtes vous embaucher par une boîte qui fait des MMO
– créez une boîte, arrangez vous pour qu’elle soit rentable avec une activité autre que le MMO, et financez le MMO avec les bénéfices

Si vous ne pouvez ni l’un ni l’autre, il vaut mieux faire autre chose qu’un MMO 3D selon moi.

Erreur classique n°10: le plantage post-proto

16 février 2010 - 19:51 | Dans Création de jeux vidéo, Erreurs classiques | 19 commentaires

D’après une étude pas du tout objective (juste une impression en fait…), il semblerait qu’il y ait deux moments critiques dans la vie des projets amateurs, deux moments où la plupart des projets se plantent.

Le premier moment, c’est juste au début, quand le projet est vraiment foireux et que la bande de collégiens qui voulait faire un « WOW en mieux » clashe parce qu’ils ne sont pas d’accords sur la couleur des poils des loup-garous qui seront présents dans le jeu.
Ça, c’est classique, on l’a déjà abordé.

Le deuxième moment est plus étrange, on voit le projet avancer, des screenshots arrivent, c’est jouable, il y a même un prototype, une petite communauté qui se crée et soudain « pouf »… le projet s’arrête: soit d’un coup avec une annonce, soit il ne donne plus signe de vie et disparaît à petit feu.

Je me suis donc demandé pourquoi. Surtout que c’est un problème qui m’est déjà arrivé plusieurs fois.

Voici donc les principales causes selon moi:

1. Trop de différences par rapport à ce qui était souhaité :

C’est ce qui arrive quand on a passé beaucoup de temps pour atteindre le prototype et que l’on se rend compte qu’il reste encore énormément de chemin pour atteindre ce que l’on souhaitait au début. Si le développement a déjà pris plusieurs années et que l’on se rend compte qu’il reste encore plusieurs années devant soi, ça décourage.

Solution: faire des projets plus simples

2. « Les autres 90% » :

En développement informatique, on dit qu’une fois les premiers 90% du logiciel développés, il ne reste plus qu’à faire les « autres » 90%.
Cela a un même un nom, la règle des 90-90 : http://en.wikipedia.org/wiki/Ninety-ninety_rule.

En fait, cela vient de l’impression d’avancer très vite au début et de faire du sur place vers la fin.
Par exemple pour un projet de jeu vidéo, on met en place Ogre pour avoir un moteur 3d qui marche, on a un début de gameplay, etc… Ce qui fait qu’on progresse très vite au début. Au bout d’un moment, il ne reste plus que les détails… en gros équilibrer le gameplay, faire les menus, les options, l’aide en ligne, paufiner l’IA, enlever le lag du jeu en réseau, débugger, traduire les textes en anglais, etc… Presque rien quoi… (ce que l’on appelle le polishing).

Sauf qu’en fait, en cumulant tous les « petits détails » de ce genre, cela prend autant de temps (sinon plus) que tout ce qui a été fait avant.

Ceci provoque tout un tas de désagréments:

  • On a l’impression de ne plus avancer car les résultats des changements sont minimes
  • On ne voit pas la fin du projet car il y a toujours quelque chose à modifier
  • C’est un travail ennuyeux
  • Il n’y a plus de créativité, plus de challenge, ce n’est que du travail « idiot »
  • Quand on voit tout ce qu’il reste à faire, on a plus envie de le faire

Solution : simplifier le projet, anticiper ces étapes

3. Le contenu :

Faire un proto avec une map de test, c’est marrant.
Faire des niveaux ou des graphismes à la chaîne, c’est moins marrant… ça peut même être lassant, voire décourageant.

Solution : éviter les jeux à contenu, ou avoir quelqu’un qui aime bien faire ça dans l’équipe.

4. La sensation « d’avoir atteint sa vision » :

Quand on veut créer un jeu amateur, on a plein d’images en tête sur ce à quoi ça ressemblera quand ça sera fini.
Le truc, c’est que lorsqu’on atteint le proto et que celui-ci est conforme aux attentes, on se dit « ouais, ça marche, j’ai enfin réussi ce que je voulais faire ».
Comme on fait abstraction des détails qui manquent (les autres 90%) et qui peuvent attendre, on a l’impression d’avoir atteint sa vision et on relâche les efforts.
Et là… c’est le drame, on perd le momentum (= la lancée qu’on avait) et c’est très dur de le récupérer.

Solution : anticiper cette sensation pour redoubler d’efforts à ce moment là

5. Les problèmes techniques non anticipés :

Quand on est tout seul sur son projet, tout va à peu près bien.
Quand on commence à avoir des joueurs, il faut gérer plein de choses supplémentaires:

  • les problèmes de configuration et de compatibilité (système d’exploitation, drivers…)
  • les problèmes de taille d’écran
  • les problèmes de lag pour le jeu sur internet
  • les problèmes de scalabilité quand le jeu est trop gourmand niveau serveur
  • etc.

Tout cela démotive car on doit régler les problèmes des autres que l’on a pas chez soi, ils sont souvent inattendus et ne font pas progresser le jeu d’un point de vue créatif.

On rajoute à cela tous les problèmes techniques liés à l’apprentissage de technos différentes (rendu graphique, moteur physique, IA, etc.), ce qui allonge la liste de toutes les choses à régler.

Solution : ne pas avoir de projets sur lesquels il faut apprendre trop de choses techniques en même temps, ça limitera les surprises.

6. La différence de qualité :

Si le projet est conséquent, on apprend beaucoup au cours de son développement. Le problème est que la différence de qualité entre ce qui a été fait au début et maintenant (qualité des graphismes, des maps, du code, etc.) est parfois telle que le jeu est devenu beaucoup trop inégal.
Comme continuer sur une base instable n’est pas une bonne idée, généralement soit le projet est recommencé du début « en plus propre », soit abandonné au profit d’un autre projet.

Solution : privilégier les projets courts, surtout si ce projet sert d’apprentissage

7. Les engueulades dans l’équipe :

Si le projet commence à avoir du potentiel, il arrive que l’équipe se déchire pour divergences d’opinions. Soit parce que certains veulent avoir une plus grosse part du gâteau que prévu, soit parce que rien n’a été prévu et que chacun a sa propre vision de ce que le jeu pourrait lui rapporter…

Une autre raison peut être un désaccord sur l’objectif réel du jeu (gratuit, open source, payant, etc.) ou de son style graphique une fois un proto technique réalisé.

Solution: bien définir les rôles et prévoir un accord à l’avance avant de s’engager avec quelqu’un, notamment sur la propriété des éléments réalisés en cas de départ de la personne.

8. Le départ des membres qualifiés :

Si l’équipe est composée de personnes compétentes et que le projet commence à se faire connaître, celles ci vont sûrement avoir des propositions rémunérées pour leur talent… A ce moment là, il sera dur de les garder pour un jeu amateur…

De plus, les nouveaux qui pourraient être recrutés pour les remplacer risquent d’être largués.

Solution: avoir des projets courts, particulièrement s’ils sont bénévoles. Si le projet est à visée commerciale, l’objectif est d’être rentable rapidement pour pouvoir payer l’équipe.

9. Le nouveau super projet qui est vachement mieux que l’actuel :

Ben oui, vous avez une super nouvelle idée qui est vachement mieux que le projet actuel. Et puis de toute façon votre code il est pas beau, il faudrait le rendre plus flexible. Et puis il y a ce nouveau moteur 3D qui a l’air bien mieux que Ogre/Irrlicht/Unity/Whatever. Quoique vous avez vu un tuto sur « comment créer son propre moteur 3D » et ça a pas l’air si compliqué que ça en fait…

De plus, c’est à ce moment que vous allez voir tous les défauts du projet actuel. Il est pas assez ceci, un peu trop cela… et au final, est-ce que ça vaut vraiment le coup de le finir ?

Solution : Savoir se fixer sur un projet. Pas toujours facile. Cela dépend aussi de vos objectifs: apprendre ou finir un projet ?

10. Être un concepteur et non un réalisateur :

Certaines personnes sont très bonnes pour concevoir des projets, élaborer la stratégie, les différents éléments du concept, etc.
D’autres personnes sont très bonnes pour les réaliser, passer au concret, appliquer les stratégies.

Être les deux en même temps n’est pas toujours facile.

Solution : être les deux, ou trouver les personnes qui vous complètent

Conclusion :
Tout ceci peut être changé par des facteurs aggravants :

– Être sur plusieurs projets en même temps (à éviter au maximum car un projet va toujours prendre le dessus sur un autre)
– Complexité du projet
– Facteurs externes qui jouent sur le moral

Si je devais résumer, la plupart des causes viennent de la complexité du projet. Donc :

  • Faîtes court
  • Faîtes simple
  • Créez un momentum pour bosser d’une traite sur le jeu et qu’il n’y ait pas de temps morts, surtout si vous êtes une équipe
  • Méfiez vous de l’impression d’aller super vite au début
  • Une fois fini, recommencez en augmentant légèrement la difficulté

Et vous, pour quelles raisons votre projet a planté après le proto ?

Erreur classique n°9: les geeks et le marketing

9 septembre 2007 - 23:18 | Dans Erreurs classiques, Marketing & Com' | 17 commentaires

Il faut se rendre à l’évidence: les jeux vidéo amateurs sont principalement faits par des geeks, et les geeks ont en général une aversion énorme envers tout ce qui s’approche de près ou de loin du marketing.

Le marketing, « c’est le mal ! »

C’est à cause de lui que l’on a des magazines remplis de pubs, des popups sur Internet, des nanas presque à poil pour vendre des brosses à dents, des représentants qui viennent nous casser les pieds pour vendre des trucs qui nous intéressent pas, des démarcheurs par téléphone pour des arnaques en tout genres et j’en passe…

Dans le domaine du jeu vidéo, cela se traduit par des pubs de déodorants dans les jeux, les screenshots « ingame » retouchés de façon extrème sous Photoshop, les campagnes de pub bidons (quelqu’un a trouvé attirante la campagne « This is living » de la ps3 ??), du « over-hyping » à la noix (PS3 toujours…) ou même le fait de baser la communication d’un jeu principalement sur des appendices mammaires…

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On a vraiment l’impression d’être pris pour une truffe quand un jeu est marketé de la sorte (surtout qu’il était pas terrible)

Bref, le geek n’aime pas le marketing, et de toute façon ça ne sert à rien: quand il a besoin de quelquechose, il va le chercher lui même, il n’a pas besoin qu’on vienne lui proposer des trucs qui ne l’intéressent pas.
En fait, il y a une sorte d’énorme confusion qui en gros signifie au geek que le marketing c’est « l’art d’arnaquer les gens en les prenant pour des pigeons ».
(Bon ok, y’a un peu de ça par moments quand même 🙂 )

Le marketing c’est nul !

Ceux ayant eu des « initiations au marketing » dans leur cursus technologique n’auront pas trop été rassurés par le milieu. Les supers ateliers où il faut trouver comment marketer une canne innovante (pour aider les personnes âgées à marcher) sont contre productifs au possible, l’exercice se résumant à trouver la plus grosse connerie possible pour faire le malin devant les autres groupes…
(Pour ceux étant passés par là, vous aussi vous avez eu les cannes avec téléphone portable intégré, ventilateur intégré ou défibrillateur intégré ? 🙂 )

En fait, le marketing n’est pas vraiment fait pour être appris avec un exemple bateau… C’est comme les cours de programmation qui se résument à un « ouais, on va coder 5 algorithmes de tri de nombres différents, c’est trop super la prog, kikoolol », à part dégoûter les débutants et lasser les initiés, je ne vois pas vraiment l’intérêt…

Comme beaucoup d’autres choses, ça ne prend de l’intérêt que lorsqu’on doit le faire pour des projets personnels.

Le résultat de tout ça…

… c’est donc que les geeks ont une aversion justifiée du marketing, ne s’y intéressent pas du tout et se content de faire leur jeu à leur goût en cherchant uniquement ce qui est « cool ».
Le résultat, on le voit souvent sur les forums: des mods Stargate, des mmorpg à la wow ou des rpg 3d « où on peut faire ce que l’on veut ». Cela ne signifie pas forcément que ce sont des mauvais projets (bien que ça soit souvent le cas), mais le problème est que ces jeux sont souvent sans intérêt réel… Ok, il y a la prouesse de réussir le projet, mais à part ça… est-ce qu’il va vraiment y avoir des personnes qui vont y jouer longtemps ? (car ils sont forcément moins bien que les jeux pros)
Autant faire le jeu qui ait le plus de succès possible non ?

Si ce n’est pas si grave pour un projet amateur (ça forme de faire des erreurs), cela est suicidaire pour les indies.

Que faire ?

Tout d’abord, il faut savoir ce qu’est vraiment le marketing… et déjà ça c’est difficile car ce n’est pas la même chose pour tout le monde.
Pour moi ce n’est ni de la vente, ni de la pub, ni de la communication… mais c’est plutôt la stratégie derrière le jeu et derrière la com et la vente. Je vous laisse la définition sur wikipedia pour plus d’informations.

Dans notre cas, le marketing serait plutôt « l’art de rendre votre jeu intéressant pour qu’il soit connu, joué (et acheté) par le plus de monde possible », cela doit se prévoir dès le début et comprend aussi bien la création du jeu que sa promotion (qu’il soit gratuit ou non).

Il y a bien sur des tas de cas et des tas d’exceptions, mais je pense qu’en se posant déjà les bonnes questions, on peut avancer pas mal sur le problème.

Exemples de questions à se poser (dans le désordre) :

– est-ce que le nom est facile à retenir ? facile à écrire ? pas trop cliché ?
Difficile de parler d’un jeu à ses amis quand celui ci a un nom impossible à retenir. Et si on arrive à le retenir, c’est difficile de le trouver si on arrive pas à l’écrire à cause d’une orthographe « originale ».

– si mon jeu est dans une liste de 30 noms de jeu, sort-il du lot comparé aux autres ?

– si mon jeu est sur un portail, avec une vignette pour le représenter (par exemple realarcade) , sort-il du lot par rapport aux autres ? attire t’il le regard ? a t’il une identité graphique reconnaissable ?

– est-ce que je peux expliquer l’intérêt du projet (et donc sa démarcation par rapport à ce qui existe déjà) en moins de 30 secondes ?
Un rpg avec des quêtes où on fait ce qu’on veut, j’appelle pas ça avoir de l’intérêt… Si votre jeu est bateau et qu’il en existe plein d’autres du même genre, personne n’aura de l’enthousiasme pour lui.

– s’il y a un unique message que mon jeu doit faire passer ou une unique phrase pour le décrire, qu’est-ce que ce serait ?

– qu’est-ce que mon jeu a d’original par rapport à ce qui existe ?
Est-il plus beau ? (Unreal Tournament 3)
Plus stylé ? (Geometric Wars)
Plus « innovant » ? (les ARG)
Plus interactif ? (les jeux Wii ou DS)
Rappelle t’il des souvenirs aux joueurs ? (Defcon et le film Wargames)


– est-ce que tous mes efforts de communication vont dans le bon sens ou est-ce que je dépasse la ligne ?

Spams sur tous les forums, exagérations, recrutement sur un forum

– quel est le public que je vise ? Comment peut il connaître mon jeu ?

– est-ce que le public que je vise est sur la plate forme que je vise ?
Faire du casual game uniquement pour linux est un mauvais choix, vouloir vendre un jeu sur un portail PC alors que le public pour mon jeu est plutôt console est un mauvais choix.

– si j’envoie mon jeu à un bloggueur, aura t’il envie d’en faire un article ou est-ce que je donne l’impression de n’être qu’un jeu comme il en existe plein d’autres
Votre jeu a t’il le potentiel de générer du buzzmarketing ? (Comme le jeu flash tower defence récemment)

– est-ce qu’un joueur qui joue à mon jeu aura envie de lui même d’en parler à ses potes ou va t’il y jouer tout seul dans son coin ?

– est-ce que la période est bonne pour lancer le jeu ?
La période de noël est blindée donc il y a beaucoup plus de concurrence et le jeu a plus de chances de sortir inaperçu alors que pendant l’été internet est en sommeil et votre campagne de promotion risque de tomber à l’eau

– est-ce que le type de jeu que je cherche à lancer n’est pas trop représenté ?
Envie de faire un fps sur la seconde guerre mondiale ? ou un clone de Bejeweled ou Zuma ? Il faudrait peut être reconsidérer votre choix. (Exception faite si le genre n’est pas représenté sur la machine que vous avez ciblé)

– est-ce que le joueur aura envie de rejouer une fois l’effet de découverte passé ?

etc…

Et après ?

Tout ceci a pour but de vous faire poser des questions sur la réalisation de votre jeu, que ce soit sur l’aspect général ou sur les détails, afin d’optimiser son intérêt final.

Le marketing (dans le sens « optimiser les chances que le jeu intéresse du monde ») est donc primordial pour bâtir une stratégie efficace dans la réalisation de votre jeu. Ce n’est pas un domaine qui a des limites strictes, cela intervient aussi bien sur la communication et la vente que sur le gameplay, les graphismes et les choix technologiques pour obtenir une stratégie cohérente avec les contraintes d’un développement amateur/indie.

Tout dépend bien entendu de vos objectifs: si vous voulez juste apprendre à programmer un jeu, le fait qu’il ait du succès ou pas n’est pas primordial.

Erreur classique n°8: commencer par la fin

12 août 2007 - 23:31 | Dans Erreurs classiques | 10 commentaires

Cette erreur est un grand classique très présent chez les équipes ne sachant pas du tout comment s’y prendre, mais je l’ai déjà observée chez des équipes semi-pros également.

La cause généralement vient du fait de l’incompétence de l’équipe qui ne travaille que sur ce qu’elle sait faire ou sur ce qu’elle pense être le plus important, mais cela peut être juste un problème d’organisation.

Voici les erreurs les plus courantes:

– On en a rien à faire du nom !

Apparemment, l’étape la plus importante pour un projet qui débute, c’est d’avoir de grandes discussions pour décider du nom du jeu. Faut faire ça tout de suite pour pouvoir bien le montrer partout.
Bon clairement, ça ne sert pas à grand chose… D’ailleurs les noms de code de projets sont faits pour éviter ce problème. Il vaut mieux nommer le jeu sur la fin ou quand on a un prototype très avancé et que l’on sait exactement à quoi ressemblera le jeu plutôt qu’au tout début où il risque de changer de nombreuses fois.

C’est ainsi que Windows Vista s’appelait Longhorn, que la Wii était la Revolution et la GameCube était la Dolphin.

Bon bien sûr si vous avez trouvé un nom cool dès le début, autant le garder, mais ce que je veux dire c’est que c’est loin d’être une priorité.

Note perso: je trouve aussi que de nombreux noms de jeux présentés sur les forums d’amateurs sont affligeants de banalité et sans aucune originalité. Je ne compte plus les noms de RPG qui se contentent juste de repomper des noms existants de RPG japonais en mélangeant les mots… vous savez, les tales of aeternia trucs ou symphonies of bidules machins qui sont censés faire « cool »… un peu d’originalité que diable ! 🙂

NB: Cela est valable aussi pour le nom de l’équipe (merci Klaim !)

– On en a rien à faire des détails du scénario

Bon, il y a sûrement des fanatiques du game design qui vont pas être contents, mais je trouve que commencer par faire un pavé relatant tout le scénario en détail et débattre de la couleur des yeux du héros est une énorme perte de temps, pour la simple et bonne raison que les projets amateurs ne se plantent pas par manque de détails sur le scénario mais par une incapacité à créer le jeu en lui même.

Quel intérêt d’avoir rédigé 200 pages de scénario si vous n’arrivez pas à faire un prototype convenable ? La couleur des yeux du héros ou son passé n’aura aucune incidence sur le reste du jeu, concentrez vous sur la création du jeu, pas sur les détails.

– Annoncer la date de sortie dès le départ

Pour commencer, vous allez forcément la rater. Ensuite, si votre jeu est attendu, vous allez provoquer la colère de vos fans ou passer pour des rigolos. Rappelez vous du lancement totalement raté d’Half Life 2 qui avait été annoncé « promis juré » un an avant sa date de sortie effective.

– Faire un site web de présentation

Faudrait qu’on m’explique l’intérêt de passer énormément de temps à faire (et refaire) un site de présentation « public » pour un jeu au tout début de sa conception… « Oh, regardez le jeu auquel vous ne pourrez pas jouer, on a des screenshots tout moches car issus d’une alpha instable ». Franchement, quel intérêt ? 🙂
Faîtes un blog ou un site statique, mais pas besoin de passer une éternité à coder un site communautaire en php ou à faire une interface magnifique, concentrez vous sur le jeu.

– Faire la jaquette du jeu (avec le logo « PC DVD ROM » et tout…) avant de démarrer le développement pour paraître « pro »

Exemple extrême, mais déjà vu… Voir plus bas.

– Faire de la promo pour un jeu en développement

Ne faire de la promo (interviews, previews, etc…) que lorsqu’on est sûr que le projet sera fini. Sinon c’est du temps perdu. J’ai en tête trois projets qui ont fait beaucoup de pub avant leur sortie: Matrix HL (mod pour HL1, jamais sorti), un mod qui s’était transformé en standalone et qui avait un journal de bord sur Gamekult (annulé) et enfin un mod HL2 (voir ci dessous).

La promo n’assure donc pas le succès, assurez vous de pouvoir sortir votre jeu avant !

3 exemples de projets où cette erreur est visible:

Je n’explique que ce que j’ai vu en tant qu’observateur extérieur.

– une équipe de collégiens (une 50aine) qui voulait construire une console de A à Z (hardware, software et jeux) qui devait être plus puissante que la Xbox360 (c’était avant sa sortie). Bien sûr ils ont commencé par trouver le nom (un truc bidon mais ils en étaient fiers) et (mal) dessiner la manette.

– une équipe qui voulait faire un système d’exploitation de A à Z étant mieux que Windows et Linux réunis. Le gars expliquait sur un forum comment il voyait le jour du lancement de son OS (avec les équipes de télé et tout) et son équipe avait commencé par trouver le nom et faire un design d’interface graphique qui se résumait à une repompe de celle de Windows, mais faite sous paint… et à la souris… (sisi…)

– un mod pour Half Life 2 commencé avant la sortie de ce dernier (beaucoup de pré-production donc), solo et multi, avec une grande équipe, 200 pages de scénar, des concepts arts, la fameuse jaquette « PC DVD » et plusieurs interviews du leader du projet qui expliquait qu’aujourd’hui les jeux étaient nuls mais que son équipe allait sortir un mod qui allait tout déchirer avec 40h de jeu en solo et un multi innovant. HL2 est sorti, et on a plus entendu parler du mod.

Conclusion :
– Il est forcément plus sexy de vouloir travailler sur les détails « visibles » qui font la grandeur d’un jeu (scénario, ambiance, etc…) que de se prendre la tête sur des éléments dont l’utilisateur final n’aura aucune connaissance (architecture de code, etc…). Mais quand on veut construire une voiture soit même, on commence par apprendre la mécanique et on construit un kart… on s’attaque pas direct à vouloir faire une Lamborghini en la dessinant et en se prenant la tête sur la couleur du volant.
– Il faut s’occuper en priorité des éléments qui auront une importance capitale dans la suite du développement (architecture du code, principe du jeu…), et ne pas se prendre la tête sur ce qui peut être changé sans conséquence à la dernière minute (nom du jeu, look du héros, etc…)

Erreur classique n°7: vouloir faire le jeu de ses rêves

26 juin 2007 - 22:26 | Dans Erreurs classiques | 14 commentaires

Cela peut paraître un peu contradictoire, mais vouloir faire le jeu de ses rêves est la base de la plupart des problèmes des jeux amateurs.

Pour expliquer cela, je reviens deux secondes sur les erreurs déjà abordées: les jeux trop longs ou trop complexes. C’est la cause de la plupart des jeux foirés, on est d’accord…

Mais quelle est la cause de cette cause ?

Je pense que c’est le fait de vouloir à tout prix chez les débutants sortir « le jeu de leurs rêves », le fameux « World of Warcraft mais en mieux ».

Les débutants sont des joueurs à la base, ils sont passionnés, aiment vivre des aventures et veulent au bout d’un moment passer de l’autre côté. Ils voient les défauts des jeux et réfléchissent alors à comment faire mieux, comment proposer un scénario béton ou comment étendre un univers qu’ils adorent (c’est pour ça que l’on voit un mmo ou un mod stargate tous les mois sur les forums de création de jeux vidéo).

Ils ont des images plein la tête et veulent donc généralement faire pareil tout en ajoutant leur touche personnelle. Ils s’imaginent alors leur version idéale, la fameuse « mais en mieux ».

Je pense que l’on est presque tous passés par là, et c’est sûrement pour cela que l’on a commencé le gamedev d’ailleurs.

Le problème c’est que faire un gros jeu de la sorte est une erreur stratégique. Les gros jeux ne sont pas adaptés aux équipes d’amateurs (sans être péjoratif), et c’est pour cela que l’on conseille au débutants de commencer par des petits jeux plus simples.
Mais c’est là que le bât blesse, faire un bomberman ou un mario, ça n’apporte plus de rêve… il n’y a pas de monde à créer, il n’y a pas de scénario épique, pas d’émotions… C’est beaucoup moins créatif et pour certains il n’y a pas d’intérêt apparent.
Ce sont les Starcraft, Doom 3 et autres World of Warcraft qui donnent envie à la majorité de débutants de créer des jeux, pas un Bomberman ou un Tetris.

Passion Vs Stratégie

Quand on s’intéresse de plus près aux gros projets amateurs, on voit qu’il y a souvent une envie de vendre le jeu au final, mais ils ne savent pas encore trop comment, « ils verront plus tard ».
Pour résumer, ce genre de projet marche à la passion, mais n’a aucune stratégie en réalité.

Le coup du « on présente l’idée à un éditeur », ça ne marche pas, pour la simple et bonne raison qu’ils ne financeront jamais un projet juste sur une idée ou un cahier des charges et qu’ils seront très exigeants même avec une démo fonctionnelle. En gros, il faut quasiment faire un jeu en entier, et encore, ce n’est pas certain d’être financé. La meilleure solution actuellement pour une équipe d’amateurs, c’est de s’auto produire et de chercher un distributeur sur Internet ou en magasin, ou même le vendre soi même sur le net.

Mais dans ce cas, ce n’est plus une équipe que vous gérez, mais une startup en devenir, et la stratégie d’une startup c’est généralement « viser haut, commencer petit ». Il faut absolument éviter de commencer par faire le jeu de vos rêves, pas besoin de créer un univers particulier, un truc épique ou autre… Pour un jeu de cette envergure, il faut une équipe pro à temps complet dessus, et ce n’est pas une équipe amateur fonctionnant pendant le temps libre qui peut y arriver.

Une meilleure stratégie, c’est qu’au lieu de vouloir faire le jeu de ses rêves tout de suite, il faut trouver comment financer une équipe à plein temps qui aura le temps et les compétences de réaliser ce fameux projet.

Comment finance t’on une équipe pouvant réaliser le jeu de ses rêves ?

– Il faut soit avoir beaucoup d’argent et fonder un studio directement avec des personnes compétentes (ce que Valve a fait, leur premier jeu c’était Half Life)
– Soit partir du bas et vendre des petits jeux qui permettront d’en financer de plus gros. C’est comme ça qu’a commencé Blizzard (Starcraft & WOW, a commencé avec des portages de jeux snes), ID Software (Doom & Quake, a commencé avec un clone de Super Mario), Remedy (Max Payne, a commencé avec un clone de Micro Machines) ou Epic (Unreal, a commencé avec des jeux de Flipper).

Le résumé du message: si vous voulez monter devenir développeur indie ou monter votre propre studio, ayez une stratégie qui vous permet de gravir les échelons en commençant par des projets simples qui financeront les suivants plus complexes, ne vous contentez pas juste de vouloir créer le jeu de vos rêves.

Erreur classique n°6: rater sa présentation sur un forum

15 mai 2007 - 22:22 | Dans Erreurs classiques | 20 commentaires

Pour avoir traîné pas mal sur des forums de création de jeux vidéo, j’ai vu beaucoup de demandes de recrutement pour des projets et, par conséquent, pas mal de sujets partir en « live », de projets délirants et de « recruteurs » totalement à côté de la plaque. Il est dommage de gâcher ou de ralentir un projet juste à cause d’une mauvaise présentation.

nb: tout ce que je dis est plutôt destiné à des projets amateurs et/ou bénévoles.

Tout d’abord, il y a quelques règles à avoir en tête avant même de vouloir poster votre demande d’aide pour votre super projet:

1. Les habitués du forum sur lequel vous voulez poster ont déjà vu des dizaines de projets bidons et/ou irréalisables passer sous leur yeux… Ils sont donc blasés et parfois cyniques. Ils sont là pour vous aider néanmoins, mais la tolérance envers les ados qui veulent faire un wow « mais en mieux » sans rien vouloir entendre est fortement amoindrie.

2. N’oubliez pas que cette demande de recrutement est comme une négociation où vous n’êtes PAS en situation de force. Ce n’est pas un job, c’est une demande d’aide généralement bénévole… c’est à vous d’être convainquant !

3. La valeur clé de votre message et de votre projet c’est la crédibilité. Il ne faut jamais perdre de vue cela ! Un seul détail peut vous faire passer pour un rigolo auprès de tout le monde. Il faut donc éviter les erreurs classiques que voici pour ne pas rater votre présentation:

– Avoir un mauvais projet

Vous avez beau avoir une présentation irréprochable, si vous voulez réaliser World of Warcraft 2 avec votre bande de 50 potes du lycée qui débutent pendant que vous vous ferez « leader scénariste »… vous vous ferez incendier quoi qu’il arrive. Ayez un projet le plus irréprochable possible.

– Avoir un pseudo ridicule

Cas extrême car généralement n’importe quel pseudo passe… mais si vous recrutez pour un projet sérieux avec un pseudo comme « Bogoss69 » ou « Allez le PSG ! », vous n’avez plus grande crédibilité

– Poster sur un mauvais forum

Prenez le temps d’observer le forum sur lequel vous allez poster, tous ne se valent pas. Un projet très sérieux sur un forum qui ne l’est pas ne servira pas à grand chose. Celui de www.jeuxvideo.com ne vaut pas celui de www.gamedev.net.

– Ecrire comme un pied

Grand classique: les messages écrits en phonétique, sms, bourrés de fautes, etc…
Il y a un principe simple: « Si vous écrivez comme un demeuré, vous serez considéré comme un demeuré ».

Le but n’est pas de faire un sans faute à la dictée de Pivot, mais juste d’être agréable à lire, et montrer que l’on a de la considération pour celui qui va vous lire.

Si vous avez des problèmes à ce niveau (dyslexie ou si le français n’est pas votre langue maternelle), essayez de trouver quelqu’un d’autre dans votre équipe pour recruter ou alors indiquez le à la fin de votre message. Il est à noter que les sites en anglais sont généralement internationaux et ont donc l’habitude de personnes écrivant mal en anglais (mais cela n’excuse pas le sms).

– Faire trop court ou trop long

Peut être l’erreur la plus fréquente, dans un cas comme dans l’autre.
Quand c’est trop court, on a droit à un « J’ai un super projet, y’a tout d’expliqué sur ce lien là bas », sous entendu « démerdez vous ». Cela prouve que vous prenez tellement en considération les lecteurs que c’est à eux de faire le travail et d’aller voir un site (qui est parfois sans réelle explication…). Est-ce que vous répondriez à une offre d’emploi « je suis génial, je vous dirais tout pendant l’entretien ! » ?

De l’autre côté, les présentations de 15 pages qui nous expliquent tous les détails du scénario et du système de combat, etc… et que généralement personne ne lit.

La solution ? Le speech de l’ascenseur. C’est un terme très connu en marketing qui a pour principe la chose suivante: imaginez que vous prenez l’ascenseur avec Bill Gates (ou autre milliardaire pour les anti-crosoft) et que vous voulez qu’il vous aide à financer votre projet. Vous avez alors 30 secondes (le temps du trajet) pour lui donner envie d’en savoir plus et qu’il ait envie de prendre votre carte de visite.

Ici c’est la même chose. Si vous ne donnez pas envie d’en savoir plus sur votre projet, personne ne le fera pour vous. S’il vous faut plus de 2 pages (2 fois la taille d’un écran) de présentation pour donner envie d’en savoir plus, c’est que vous n’êtes pas assez convainquant.

Il faut donc peaufiner votre présentation pour atteindre cet objectif. Travaillez également votre « unique selling point » (USP), à savoir le point principal qui fait l’intérêt de votre jeu par rapport à ce qui existe.
ps: non, proposer un mmo « qui permet de tout faire » n’est pas un usp.

Si c’est juste un clone d’un jeu existant pour apprendre à programmer, indiquez le.

– Faire du sensationnalisme

Etre convainquant ne veut pas dire en faire trop… Si vous commencez à sortir des énormités (ce projet est la chance de votre vie, vous êtes idiot si vous venez pas) ou à essayer d’attraper le gogo (mon jeu il est super génial que ça va tout révolutionner), vous allez faire fuir plus qu’autre chose.
Le sensationnalisme ne marche pas du tout sur les personnes expérimentées, surtout chez les geeks.

– Avoir un « passé » gênant

Avec les forums, il suffit de cliquer sur votre pseudo pour voir tous vos autres messages. Si quelqu’un susceptible d’être intéressé découvre que vous écrivez n’importe quoi sur d’autres sujets ou que vous vous engueulez avec tout le monde, vous aurez perdu toute chance de le recruter.
Si on admet que cela s’était passé dans des temps immémoriaux où vous étiez jeune et insouciant… mieux vaut alors créer un nouveau profil histoire de faire oublier tout ça (en espérant que vous ayez amélioré votre comportement depuis).
A noter que si une recherche google sur votre pseudo ou votre site web fait sortir d’autres histoires du même genre sur d’autres forums, c’est que vous avez clairement un problème 🙂

– S’énerver

Grosse erreur facile à mettre en évidence. Prenons par exemple un projet mal présenté avec de grosses lacunes, on peut soit y répondre « tout cool » en disant « ouais nan mais ça serait mieux si ça ou ça… » ou alors on peut être franc et direct en sortant un « Ã§a je vois pas l’intérêt, le graph est pas top, t’as oublié ça et ça… ».

La plupart du temps quand il s’agit de la deuxième méthode, le posteur du projet va partir en live dès que l’on va attaquer son projet… en allant du « t’es qui toi pour oser dire ça » jusqu’aux insultes.
En croyant bien faire (défendre le projet), ils font la pire chose possible: attaquer ceux qui montrent les défauts visibles du projet ou de la présentation.
En tant que leader, il faut savoir rassurer sur les points qui fâchent, montrer son ouverture d’esprit, admettre ce qui ne va pas.
Vous aimeriez entrer dans une équipe d’un gars qui s’énerve à la première critique vous ? (qu’elle soit fondée ou non)

Une réponse beaucoup plus simple et utile quand le projet se fait critiquer est simplement de dire « ok, t’as peut être raison… tu ferais ça comment toi ? ».

– Dire que l’on est super motivé et que quoi qu’il arrive le projet sera fini

Non, ne le dites pas… Vu que tous les leaders de projets abandonnés l’ont dit également

– « Bumper » le sujet plusieurs fois

Vous avez posté votre présentation, et c’est le drame… personne ne répond… Vous le relancez une fois ou deux en espérant des réponses mais toujours pas… Dans ce cas laissez tomber et revenez quand vous aurez de nouvelles choses à montrer. Rien n’est plus agaçant de voir la même personne écrire des « up » tous les jours sur son sujet… Le projet ne sera pas plus convainquant pour autant, au contraire même… C’est comme ceux qui relancent leur sujet 10 minutes après l’avoir posté en gueulant que personne n’y répond et que c’est pas normal… rien de mieux pour vous faire haïr de tout un forum.
Dans le même thème, évitez les titres qui ne veulent rien dire, l’écriture en majuscules, de vous tromper de section dans le forum ou de poster plusieurs fois le même sujet dans différentes sections.

Ah oui, et il vaut mieux un sujet sans réponse qu’un sujet qui parte en troll.

– Ne pas se présenter.

Tant qu’on ne vous connaît pas beaucoup sur un forum, vous serez toujours potentiellement considéré comme un gamin de 12 ans qui veut révolutionner le monde du jeu vidéo. Si vous voulez recruter pour un projet sérieux, il va falloir vous dévoiler un peu plus afin de gagner en crédibilité.
Il faut donc dans votre présentation indiquer brièvement:
– votre âge, quel qu’il soit (ne jamais, au grand jamais, refuser de le donner… puisqu’on va vous le demander au final…je préfère largement quelqu’un de 14 ans qui assume le fait d’être débutant qu’un de 16 qui veut jouer les pros et refuse de dire son âge par peur de ne pas être crédible… )
– votre activité si elle est en relation (un professionnel du jeu vidéo est plus crédible qu’un ingénieur en informatique, qui est plus crédible qu’un étudiant en info, qui est plus crédible qu’un lycéen, etc…)
– votre expérience si elle est en relation (programmes, projets déjà réalisés, gfx, etc…)
Le reste est inutile… savoir que le jeu vidéo c’est « votre grande passion » ou que vous aimez les poneys n’apporte aucune information utile.

Il faut ensuite faire pareil pour les membres de votre équipe (faîtes rapide aussi, tout en une seule ligne si besoin).
Evitez de faire comme ceux qui ne font qu’énumérer la liste des pseudos des membres de leur équipe, ça ne sert à rien.

– Recruter pour une idée de jeu que vous avez eu hier soir dans votre bain

Personne ne va vouloir vous rejoindre si vous n’avez pas un minimum travaillé de votre côté dessus.

– Ne pas répondre aux questions qui fâchent

Sachez vous remettre en cause si besoin est. Admettez le fait de pouvoir avoir tort, de ne pas tout connaître et qu’il y ait des lacunes dans votre projet. Rien de plus énervant que quelqu’un qui ne répond pas à des questions précises quand on montre les problèmes de son projet.

– Ne pas donner d’objectif

Les projets faits pour apprendre n’attirent pas les mêmes personnes que ceux faits pour créer une société. Il convient donc de bien préciser vos objectifs.
De plus, un projet doit être fait pour être vendu ou pour ne pas l’être, évitez le « on fait ça et on verra plus tard si on le vend et alors on partagera », car les stratégies ne seront pas les mêmes.

Bon, je pense avoir fait le tour, je ferais peut être une suite si je trouve d’autres erreurs typiques.
ps: le prochain article sera plus court, promis… 🙂

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